Le Bénin semble avoir frappé un grand coup dans le domaine de l’éducation en mobilisant un nombre impressionnant de partenaires autour de la stratégie de financement de l’Enseignement, la Formation Technique et Professionnelle (EFTP). L’argent mobilisé (323 milliards Francs CFA) autant que les ambitions affichées de faire désormais de l’EFTP, la priorité de l’enseignement (passer de 30% à 70%) forcent l’admiration.
Notre journal spécialisé, Educ’Action, qui a eu l’honneur de couvrir l’évènement a, par la plume incisive du Directeur de Publication, apprécié et analysé les tenants et les aboutissants de ce processus, traçant à la limite une feuille de route pour une mise en œuvre harmonieuse.
C’est pourquoi ma chronique souhaite juste s’attarder sur un aspect qui m’a interpellé au cours de quelques discussions nourries avec des techniciens qui se sont demandés où se situait l’apport des autres parties prenantes que sont l’Etat béninois, les entreprises béninoises et les parents béninois dans la mesure où ce qui est gratuit ; ce que l’on te donne sans ton propre investissement, n’est jamais bien utilisé ! Les réponses que j’ai trouvées sont les suivantes:
Pour l’Etat, même s’il n’y a pas eu une annonce, on peut déjà mesurer son apport à travers la mobilisation de ses cadres techniques qui, pendant plusieurs mois, ont décliné la vision du Gouvernement dans un document d’ensemble, en cohérence avec la plupart des documents de planification du pays (PAG, PND, PSE, etc.). N’oublions pas que c’est l’Etat qui paie ces cadres et paiera tous les enseignants qui se retrouveront dans les écoles à créer.
Quid des entreprises en l’occurrence privées qui se plaignent de ne pas avoir de mains d’œuvres qualifiées ? Les premiers concernés par la formation des élèves, ce sont ces entreprises qui vont les utiliser et qui n’auront plus à aller chercher une main d’œuvre onéreuse à l’étranger. Et pourtant, on ne les a pas entendues déclarer leurs contributions. Vous me direz qu’ils financent déjà les caisses de l’Etat par les impôts ! Mais dans le cas d’espèce où il s’agit de se focaliser sur leurs besoins, il est important de constater leur accompagnement effectif à plusieurs niveaux. Ainsi, dans plusieurs pays occidentaux ou africains, les entreprises accompagnent les écoles techniques et de formations professionnelles en indiquant leurs besoins et en mettant en place des mécanismes de tutorat ou d’appui direct aux écoles. La solution la plus adéquate dans le cas d’espèce, c’est la mise en place par l’Etat des Lois et mécanismes qui contraignent les sociétés à s’acquitter de leur Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE). En effet, la RSE dont les Lois sont bien établies dans la plupart des pays, demande à ce que chaque entreprise verse un pourcentage (1%, il semble) de son bénéfice pour les œuvres sociales, notamment l’éducation. Prenez nos banques, nos assurances, nos GSM et regardez le nombre de milliards qu’ils brassent par jour et vous comprendrez la nécessité de cette RSE qui n’est pas si financement contraignante. Beaucoup d’entreprises ont, en réalité, envie de le faire ; c’est pourquoi elles mettent en place des fondations. Pour d’autres, des sollicitations de personnes d’influence, notamment politiques vident leurs caisses de mécénat. Enfin, il y a ceux qui pensent que les lourdeurs et autres contingences administratives ne permettent pas de financer véritablement le social.
C’est pour cela qu’il faudrait réfléchir à la mise en place d’un creuset commun, c’est-à-dire une agence de type Partenariat Public/Privé (PPP), dans laquelle se fera la mobilisation de financement de la RSE ou tout autre financement additionnel, avec une gestion d’entreprise autonome qui définit les besoins nationaux et financiers. Cela aura l’avantage de satisfaire tout le monde. Evidemment pour terminer à ce niveau, on parlera de profits : mais que gagnent les entreprises ? Elles y gagnent énormément avec des personnes compétentes et des exonérations qui viendront nécessairement au regard des investissements qu’elles auront réalisées car, au lieu de donner par exemple de l’argent à une personne d’influence qui va aider à contourner une règle et lui être inutilement redevable, il s’agira d’aider tout un peuple à évoluer et de récolter les fruits de leur redevabilité.
Enfin, les parents, premiers contributeurs,seront toujours là et prêts à financer la scolarité de leurs enfants dans les filières porteuses. Je me souviens encore de ce parent qui, après le BAC de son enfant, me l’a amené soulignant : « Il veut faire l’électricité juste pour deux ans et commencer à travailler ; on n’a pas beaucoup d’argent ! On peut aller dans quelle école ? »
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe